Présentez-vous

J’ai toujours aimé l’image. Mon père m’a offert mon premier appareil quand j’avais 15 ans. Je me baladais toujours avec et je faisais beaucoup de photos de rue. Parallèlement à cette passion, j’ai suivi un cursus littéraire option théâtre. Nous abordions la pratique théâtrale, le jeu d’acteur mais aussi énormément l’aspect théorique, notamment au travers de la scénographie. Ensuite, j’ai poursuivi par des études d’art plastique à Bordeaux puis j’ai tenté le concours d’entrée aux Gobelins à Paris, où j’ai été reçue ! Techniquement, j’ai appris beaucoup de choses mais je me suis vite rendue compte que le contact avec l’humain, avec la vraie vie, me manquait énormément (nous faisions principalement du studio). J’ai donc assisté plusieurs photographes de presse et cela m’a confortée dans cette envie de faire du portrait. Parallèlement, j’ai commencé à développer mon travail personnel, j’ai arrêté l’assistanat au bout de 5 ans et me suis lancée. J’ai eu la chance de croiser la route d’Eric Higgins, collectionneur et éditeur de portfolios, pendant des rencontres organisées par la MEP (Maison Européenne de la Photographie), je lui ai montré les premières photographies de ma série « Pieds nus » à laquelle j’avais mis un terme et il m’a encouragé à la reprendre et me disant qu’il y croyait. J’ai eu vraiment l’impression qu’il m’avait sondée et que quelqu’un comprenait quelque chose de moi que je n’avais moi-même pas intégré. Deux ans plus tard, mon portfolio est sorti, avec, en plus, une préface d’un grand monsieur de l’art contemporain, muséologue, critique et universitaire, Paul Ardenne. Je l’ai contacté au culot, en suivant les conseils d’une amie journaliste et j’ai eu de la chance! Il a un regard très intéressant sur les femmes et sur la photographie.

Emma Barthère

Comment vous-êtes vous professionnalisée dans la photographie ?

Vers l’âge de 15 ans mon père m’a mis un appareil entre les mains et depuis je n’ai jamais cessé la photographie.

Avant d’intégrer les Gobelins, j’ai longtemps pratiqué la photographie en autodidacte, ce sont d’ailleurs mes meilleurs souvenirs : des journées solitaires à arpenter le monde puis des heures enfermées dans le noir, enivrée par l’odeur des produits et émervéillée par la magie de la chimie …

Je réalise à quel point ma pratique a évolué depuis. Maintenant je ne fais presque plus de photo de rue ; tout passe d’abord par la tête, je conceptualise plus, parfois trop. Heureusement au moment de la prise de vue, la réalité me dépasse bien souvent, je suis forcée de lâcher prise et c’est fantastique !

Qui sont le ou les photographes qui vous inspirent ?

Au niveau de mes inspirations, je suis plus touchée et influencée par la peinture que par la photographie. Comme le peintre américain comme Richard T Scott. Je me retrouve totalement dans son art. Il travaille avec tous ces codes propres au classicisme et j’aime sa façon de brouiller les choses, d’offrir à son spectateur de nouvelles perspectives. Je puise également mon inspiration dans la peinture baroque, le surréalisme, le romantisme et le travail du groupe de photographes Photo-Secession dont faisait partie Alfred Stieglitz et qui, au début du XXème siècle, s’est battu pour positionner la photo comme un art à part entière et lui faire prendre un tournant décisif. Mes autres sources d’inspirations? La nature, l’amour, ce qui explique que je travaille beaucoup sur le couple, certains penseurs, mon parcours au théâtre, des auteurs comme Joël Pommerat ou Peter Brook, l’architecture intelligente ainsi que tout ce qui concerne l’écologie, un sujet auquel je suis très sensible.

Quel est votre plus beau souvenir photographique ?

Le premier qui me vient à l’esprit est celui d’une séance réalisée dans l’urgence au théâtre des Bouffes du Nord à Paris. J’habitais à deux pas du théâtre à l’époque et lorgnais dessus depuis des mois ; je rêvais de photographier ce magnifique mur rouge patiné par le temps (il paraitrait que c’est l’œuvre d’un artiste …) et un matin je me suis lancée ! Par chance, le théâtre était en travaux, le régisseur allait bientôt partir et s’est laissé aller à un peu plus de laxisme que d’ordinaire : les ouvriers allaient faire leur pause déjeuner à 12h, j’avais un peu moins d’une heure pour faire quelques photos, et ceci le jour même. J’ai couru chercher une amie, à midi nous étions dans le théâtre, seules. Elle s’est déshabillée et a dansé sur la scène. C’était un moment magique et très puissant. Ce sont des photos dont je ne me lasse toujours pas, c’est le signe qu’il s’est vraiment passé quelque chose.

Au niveau technique, comment travaillez-vous ? De la prise de vue au post traitement ?

J’alterne entre photographie argentique au moyen format (principalement pour mes travaux personnels) et photographie numérique en 24×36 pour tout ce qui est travail de commande.

Pour ce qui est du tirage, je n’en fais plus mais travaille avec un tireur fabuleux basé sur Montrouge : Diamantino Quintas.

PROJET PHOTOGRAPHIQUE & PLEIN FORMAT

Pouvez-vous nous expliquer votre projet photographique ?

« Mai 2015. Je pose mes bagages à Granville.
L’une des premières choses que je fais en arrivant est de prendre un peu de hauteur.
Grimper le Roc – faire face à la ville
Le tableau est grandiose.
Ouf! je ne me suis pas pas trompée.
Oui je peux vivre ici.
Oui, Granville et ses toits m’apporteront ma dose vitale d’émoi quotidien et de poésie légèrement surannée. Oui j’en suis sûre, ce paysage d’ardoises et de zinc saura nourrir mes fantasmes.
Pour moi, le choix de vivre dans une ville plutôt qu’une autre est intimement lié à la grâce de ses toits. Je vous le concède, ce n’est pas une exigence des plus facile.
Mais comment imaginer, vivre, créer, aimer si le toit au dessus de ma tête
n’est pas en mesure d’honorer la lumière qui vient le caresser ?
Ce projet est une invitation à prendre de la hauteur et réapprendre à voir.
Un hommage à Granville mais aussi et surtout à ses femmes … »

PROJETS FUTURS

Quelle est votre actualité photographique ?

  • J’expose tout pres de Rennes, à Cesson- Sévigné en compagnie de jeunes artistes très talentueux ; et ce grâce à Loïc Bodin de l’association les Ailes de Caïus.

ROMANTIC AGAIN à la galerie Net Plus, le 21 juin, à 18h30 (Césson-Sévigné).
Avec les oeuvres de : Aude Anquetil, Angélina Nové, Emma Barthère, Cassandre Cardiet et Arnaud Rochard.
A cette occasion, et pour célébrer la fête de la musique, l’Orchestre Symphonique de Bretagne vous propose de découvrir 3 défis musicaux en complicité avec les oeuvres exposées. 

  • Tout début juillet nous réaliserons avec le Collectif XXL, un nouvel affichage dans la ville, probablement sur l’ancienne banque de France.Désireux de reconsidérer la manière de donner à voir la photo, nous avons créé avec l’afficheur Patrick Schmitt et le vidéaste Sven Laurent, le Collectif XXL.
    En partenariat avec la mairie de Granville, plusieurs affichages grand format ont déjà été réalisés au sein de la ville.
    Nous aimons idée d’offrir ces photographies à la vue de toutes et tous, sans distinction de classe ni d’âge. Le rapport à l’image est spontané, l’impact direct.
    Au détour d’une rue, le promeneur est comme happé malgré lui, propulsé dans une autre dimension.
    La ville est une alliée, à la fois sujet et support – elle porte en ses flancs la matière créative.
    Au travers de ce projet, nous souhaitons amorcer une action concrète de revitalisation des centres bourgs.
    En résulte, une forme d’appropriation par les habitants et usagers de leur lieu de vie mais aussi une forme de ‘redécouverte’ de leur propre territoire au travers de l’œil du photographe.
  • Rien n’est encore décidé mais il est probable que mes sirènes prennent le large du côté de la Nouvelle Orléans à la fin de l’année dans le cadre du festival PhotoNola… Chut !

 

 

Où peut-on voir votre travail ?

Sur mon site qu’il serait temps que je mette à jour !
www.emmabarthere.com

Pour finir, parlez-nous d’une photo qui vous a marquée ?

Mon premier émoi photographique remonte à ma découverte du travail de Joel Peter Witkin dans un vieux numéro du magazine ZOOM. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de faire de la photo.